Ces jours-ci, c’est au tour de Hollande d’exposer ses thèses. Viendront celles de Sarkozy après que l’on a écouté celles de Bayrou, Mélenchon, Dupont-Aignan et M. Le Pen.
A la suite de ces années de gabegie du monde de la finance, je me suis rendu à l’évidence que l’Ordre mondial dans lequel les ultralibéraux nous ont entraînés n’est plus viable. Plus viable pour les 99% d’humains placés sous le joug de ce 1% d’aristocrates de la planète.
Il ne s’agit pas là de théorie du complot, ni de l’amertume d’un pauvre d’entre les pauvres.
Bien sûr les indonésiens, les chinois, les indiens, les brésiliens vivent mieux qu’avant. D’autres progrès de condition de vie sont à espérer ici ou là. Mais on ne peut se satisfaire de ces développements favorables quand on les ramène à l’évident défaut de répartition dont souffre l’extrême expansion de la richesse mondiale.
La vérité est que quelques peuples ont eu la chance de s’être trouver sous la queue de la comète et d’avoir pu bénéficier des retombées de miettes qui s’en échappe.
La vérité est que les aristocrates financiers ont dû donner le change pour que perdure leur pouvoir toujours croissant, démesurément croissant. Comme le faisaient les monarques féodaux.
Le problème, c’est que l’injustice commence à se voir un peu trop.
Le problème, c’est que les monarques en veulent toujours plus et qu’ils ont perdu le sens de la mesure.
Alors oui, je cautionne les « indignés » et je crois qu’au-delà de l’indignation, des actes émergeront d’une façon ou d’une autre.
J’entends désormais avec plus d’acuité que je ne le faisais jusque là, (pourtant je l’ai toujours aimé) le mot de « Révolution ».
De tout temps, au sein de la tribu, des provinces, des royaumes, des nations, il y a eu des dominants qui raflaient à leur seul profit le produit des efforts de la communauté. Et de tout temps, ils furent destitués dès lors qu’ils dépassaient les bornes.
Constater cela est bien banal, et ne parler que du retour nécessaire à la « bonne mesure » quand d’autres parlent de révolution peut paraître bien mièvre. Pourtant il s’agit bien de cela : de bornes dépassées. De ce diagnostic simplissime et suffisant émerge toujours la révolution.
Ainsi peu à peu, comme un symptôme, des mots aussi ringardisés que « partage », « solidarité », « répartition », « redistribution » reprennent la résonance qu’ils n’auraient jamais dû perdre.
En ce temps où les monarques aussi se sont mondialisés, éparpillés en réseaux invisibles, sans château à assiéger, sans troupe à combattre même à main nue, les verrous paraissent inexpugnables. Pourtant, comme à chaque fois, le premier rempart qui s’élève face à l’outrance et l’avidité des puissants, c’est l’honneur de l’opprimé. Et puis monte la colère.
L’effroyable arrogance des « messagers » de la finance ne cesse de l’exacerber. J’ai nommé les banquiers, les grands patrons, les analystes financiers, les politiciens de la pensée unique, les économistes libéraux et leurs journalistes inféodés.
« Baissons les dépenses publiques, baissons les salaires », « les riches et leur quelque argent ne peuvent être une variable d’ajustement », « nul salut, hors de l’austérité.«
Par contre, sous leur autorité, la baisse des salaires a toujours été considérée comme la variable d’ajustement idéale. Quelle importance ! 100 ou 200 € de moins quand on a déjà si peu !?
Par contre, sous leur autorité, la baisse des dépenses publiques jusqu’à la corde sera toujours préférable à la remise en cause des 40 Mrds versés chaque année aux quelques milliers d’actionnaires pompant sans vergogne une économie française déjà exsangue. Pour ceux-là nulle cure d’austérité n’est envisageable, pour ceux-là aucun effort de solidarité – cette incongruité- ne pourrait leur être imposé, pour ceux-là rien ne justifierait de surseoir à la construction d’une nouvelle piscine, au renouvellement de leur Audi Sport ou à l’achat d’un chalet supplémentaire à Megève.
Tout cela n’est pas de l’amertume mal placée comme ne l’est pas moins leur argent.
Leur constance dans la cupidité est tout bonnement inconcevable et l’aveuglement de leurs « messagers » ne l’est pas moins.
6 Mrds de paquet fiscal redistribués à quelques milliers de nantis chaque année, ce qui après division dûment effectuée représente une moyenne de quelques 300 000 € remboursés par tête de pipe de la caste des très riches par le Trésor public, chaque année, avec l’argent de notre travail et avec l’argent de notre dette. Pour eux, tout cela est bien normal. Nous sommes, paraît-il, en période de crise, chacun doit se serrer la ceinture… mais cette situation, tout au plus désolante, ne les concerne pas. Ils sont au-dessus du lot. Ce sont les Aristocrates.
Ces jours-ci, – pour ne pas rester uniquement franco-français -, nous parviennent des nouvelles de Grèce. On y apprend que désormais, outre les fermetures des commerces, des entreprises, les baisses de salaires et des pensions, l’exode de ceux qui le peuvent, le désespoir des déclassés jetés à la rue, réduits à la mendicité, les suicides de plus en plus nombreux de gens qui comme nous n’avaient pas été préparés à la pauvreté, outre cette descente aux enfers, nous apprenons que les gens se battent pour quelques légumes pollués au chrome distribués en plein centre d’Athènes, nous apprenons que les gens ont faim et que les enfants grecs grappillent partout où ils le peuvent de quoi manger, quand ils le trouvent, s’ils le trouvent.
Alors non, tout cela n’est pas de l’amertume mal placée.
En Europe, de plus en plus de citoyens portent et porteront des haillons, se déplaceront nu-pieds, ne pourront se laver, ne se chaufferont pas, inaugureront le repas quotidien unique… Ne se raseront plus, n’iront plus au spectacle, n’achèteront plus de glace au bord de la plage… Les commerçants ne vendront plus. Finis les achats de fringues, de bijoux, le coiffeur et l’esthéticienne, fini le resto en famille le dimanche midi, l’abonnement à la salle de sport… Les gens resteront chez eux à repriser leur chemise devant leur télé, mobiliseront leur dernière économie pour acheter le scooter qui les affranchira du parcmètre et de la pompe à essence gloutonne… Le commerce s’arrêtera comme l’arrêt du Gulf-Stream réfrigérera l’Europe.
La Grèce, l’Italie, l’Espagne, le Portugal, les provinces anglaises, l’Irlande… La pauvreté est en marche mais tous les soirs à la télé, nos politiciens à cravate bleue viennent nous dire avec aplomb qu’elle s’arrêtera aux frontières françaises comme le nuage de Tchernobyl.
Pourtant aujourd’hui, malgré eux, « Révolte » n’est plus un gros mot.
Revenons aux présidentielles et au choix qui nous est proposé.
D’abord, a-t-on seulement le choix ?
Hollande – Sarkozy.
Bonnet blanc et blanc bonnet car dans les grandes lignes macro économiques, ils se réfèrent au même système. Les mêmes caisses vides, la même monnaie, la même dette, la même Europe, le même ordre monétaire mondialisé, et aucune marge de manœuvre.
D’un côté, nous avons Sarkozy, le célèbre VRP des classes d’argent.
De l’autre, Hollande qui, sauf énorme surprise, jouera pour le même camp libéral.
Même si ses « clients » (commanditaires) ne sont pas tout à fait les mêmes (va savoir ?), on sait que les différences se développeront à la marge.
La marge… Voilà ce que l’on propose aux français : La marge, le choix du pauvre qui, comme toujours votera par dépit, avec fatalisme.
Au moment où la révolte est devenue nécessaire, qu’elle est chevillée au corps de la plupart de nos compatriotes, que le bon sens l’appelle, voilà le pauvre choix qui nous est proposé… imposé.
Et par un ressort machiavélique, Sarko est devenu un tel épouvantail épouvantable que la peur de le voir revenir va pousser les français au funeste Vote Utile dès le 1er tour.
Hollande et « l’autre » osent, dans un dernier artifice, nous parler de sang et de larmes pour maintenir quelques mois encore, sous nos têtes endormies, le mol oreiller d’une société de consommation à bout de souffle. Pourtant, ce faisant, la couleur est annoncée : du sang et des larmes. Et malgré cet augure terrible, la masse populaire semble se préparer à voter pour le maintien du système.
Bon sang, si véritablement le sang et les larmes doivent couler au moins que cela serve à renverser la table ! Que tout ce malheur ne soit pas vain !
Il faut donc croire que le troupeau docile se satisfait encore du peu de paille qu’il trouve en sa bergerie, et tant que les ventres seront pleins, il ne regardera pas d’où vient la paille.
Grand bien lui fasse même si le renouvellement du fourrage est assuré par les loups.
Tout le monde sait que ça ne durera pas. Les loups sont aux portes des villes. Beaucoup ont déjà sonné l’alarme. Les français, il faut le croire, n’ont pas encore mal… pas suffisamment, mais ça viendra, hélas.
Hollande et « l’autre » le savent aussi. Mais pour eux rien ne doit changer. Pas encore.
Alors en les écoutant, nous vivrons encore notre vie de ramasseurs de miettes, sans honneur et sans fierté. En les écoutant, l’avenir restera bouché et la spirale dans laquelle nous aspirent les insatiables cols blancs de la Finance ne cessera de creuser notre malheur. Nous le savons, mais rien ne doit changer. Pas encore.
Alors bientôt il faudra nous rendre à l’évidence : Ensembles, nous n’aurons rien construit. Le capitalisme continuera d’engraisser les mêmes nantis et nous aurons oublié ce que voulaient dire « partage », « solidarité », « répartition », « redistribution ». Nos enfants riront, s’ils le peuvent encore, des rêves communards, des droits acquis, des hippies qui faisaient l’amour, des services publics, des restos du cœur, de la croix rouge, des morts pour la France.
Ensembles, nous aurons laissé tout se déconstruire.
Nos enfants riront… peut-être.