Mathématique du Pouvoir


Mathématique Du Pouvoir

« L’erreur de ceux qui, de bonne foi dans leur amour de la liberté, ont accordé à la souveraineté du peuple un pouvoir sans bornes, vient de la manière dont se sont formées leurs idées en politique. Ils ont vu dans l’histoire un petit nombre d’hommes, ou même un seul, en possession d’un pouvoir immense, qui faisait beaucoup de mal ; mais leur courroux s’est dirigé contre les possesseurs du pouvoir, et non contre le pouvoir même. Au lieu de le détruire, ils n’ont songé qu’à le déplacer » – Benjamin Constant


Le suffixe -cratie se décline à partir du mot grec kratos qui signifie Pouvoir. Ce n’est pas un scoop. 
Ce suffixe est accolé à de multiples préfixes qui indiquent à qui est attribué ce Pouvoir. On parle ici du Pouvoir politique.
Démocratie, Aristocratie sont des mots typiques de cette composition linguistique.

Le suffixe -archie procède de la même manière, décliné à partir du mot grec arkhê qui veut aussi dire Pouvoir avec un sens plus orienté sur l’aspect commandement de son exercice.
Monarchie et Oligarchie sont typiques des mots issus de ce montage.

Les préfixes associés désignent les détenteurs du Pouvoir et décrivent donc la portée dudit Pouvoir.
Les différentes déclinaisons des mots en -cratie et en -archi embarquent, par leur préfixe, l’identification des détenteurs, ou leur caractéristique (cleptocratie : le Pouvoir détenu par des « voleurs »). Mais une fois distingués, le biais qui est déterminant pour parvenir à nommer un système politique est la notion quantitative du poids démographique des tenants dudit Pouvoir.

Si l’identification des détenteurs (monarque, peuple, aristocrates,…) est une nécessité sémantique d’évidence, le critère quantitatif reste un facteur prépondérant pour qualifier les différentes formes de Pouvoir politique.
Cela ne veut pas dire que le Pouvoir induit est proportionnel au poids démographique du collège des détenteurs du Pouvoir. Ce serait trop simple. D’où le titre de cette présentation : Mathématique du Pouvoir.

Autocratie

Commençons par le système politique le plus concentré.

Autocratie : Pouvoir concentré en un seul point du Tout (une forme oligarchique particulière voir chapitre Oligocratie – où le groupe des oligarques ne compte qu’un seul membre).

Déclinaison :

Monarchie : Pouvoir du Monarque (mono : seul – arkhê : Pouvoir ; « Pouvoir d’un seul »)

Pasocratie

Pasocratie : Pouvoir de chaque individu (Pâs : chacun – Kratos : Pouvoir) ; souveraineté de tout individu quelles que soient ses caractéristiques.

La Pasocratie désigne la situation où TOUT le Pouvoir est entre les mains de chaque individu (une autre forme oligarchique particulière où le groupe des oligarques compte l’ensemble des individus, ou plus précisément, où il y a autant de groupes oligarchiques que d’individus)

La Pasocratie est donc un système où chaque individu, membre du Peuple, aurait Tout Pouvoir. Ainsi le Pouvoir ne serait pas distribué à proportion entre chaque partie du Peuple mais chaque partie aurait TOUT le Pouvoir.

Le prolongement d’un tel système ressemblerait à un Olympe sans Zeus.

Acratie et Anarchie

L’Acratie, l’Anarchie (absence d’autorité, de domination, de Pouvoir – dans sa version « désordre » ou sa version « autonomie citoyenne ») sont des formes amendées de la Pasocratie puisque le Pouvoir en étant « effacé » y est, par conséquent, transféré, « cloné » en autant d’exemplaires qu’il y a d’individus dans le Peuple.
Le Pouvoir n’étant nulle part, il se trouve de fait partout, en chacun. En conséquence, nous nous retrouvons en présence d’une Pasocratie insincère, puisque toute partie du Tout est détentrice de TOUT le Pouvoir sans qu’elle assume cette détention.

Les extrêmes se rejoignent :

En Pasocratie, toute personne est détentrice de TOUT le Pouvoir ; En Autocratie, une Seule personne détient TOUT le Pouvoir.

Or les personnes sous système pasocratique se trouvent dans la même situation que l’Autocrate : dans les deux cas, chacun détient TOUT le Pouvoir.

En conséquence : en Pasocratie, en Acratie, en Anarchie, chaque citoyen est un Autocrate.

Oligocratie

Elargissons l’éventail des possibilités de pouvoir

Etymologiquement,
Oligocratie : Pouvoir d’un petit nombre d’individus (Oligo : peu – Kratos : Pouvoir)

Ici, il ne s’agit pas de désigner la somme des Pouvoirs d’un petit nombre mais de désigner la situation où TOUT le Pouvoir est entre les mains de quelques individus.

Explicitement,
Oligocratie : Système d’organisation politique où le Pouvoir est détenu par un petit nombre d’individus. Forme de gouvernement où l’autorité est entre les mains d’un petit nombre d’individus qui exerce le Pouvoir du haut vers le bas.

Oligarchie (Oligo : peu – archos : commencement, ce qui est premier ou arkhê : Pouvoir, commandement) peut être synonyme d’Oligocratie, ou bien désigner le groupe détenteur du Pouvoir oligocratique formé par les oligarques.

Déclinaisons par spécification des « oligarques » :

    • Aristocratie : Pouvoir des meilleurs (aristo : meilleur – Kratos : Pouvoir)
    • Ploutocratie : Pouvoir des plus riches (ploûtos : richesse – Kratos : Pouvoir)
    • Pouvoir Censitaire : Pouvoir de ceux qui acquièrent le droit de vote par le paiement du Cens (à l’origine, redevance due au seigneur pour possession de terres, commuée en impôt pour obtenir le droit de vote et être éligible)

La mathématique égalitaire ou équitable voudrait qu’un petit groupe ait un Pouvoir proportionné à son nombre d’individus. Pourtant, en Oligarchie, les oligarques s’arrogent la totalité du Pouvoir. Ce hiatus arithmétique est à l’origine d’un sentiment d’injustice incontournable pour quiconque cultive un esprit critique.

En conséquence, lOligarchie fait l’objet d’une défiance coutumière en raison de sa non représentativité et de la verticalité de l’exercice du Pouvoir. Quelles que soient les décisions qu’elle peut prendre – bonnes ou mauvaises -, ces dernières seront perçues comme illégitimes.

Conflits et prises illégales d’intérêts, corruptions, vols, trafics d’influence, népotisme, favoritisme, etc… sont les soupçons, les accusations et les condamnations les plus souvent portés à l’encontre des membres d’une Oligarchie.
La sécession d’avec le Peuple est le syndrome dont les oligarques sont accusés.

On voit là apparaître un facteur important : la légitimité.

La légitimité est la résultante finale des processus d’accession au Pouvoir : par l’adoubement (Autocratie) ou par la validation du résultat d’une procédure de vote (Démocratie).
Quel que soit le processus, la légitimité n’est acquise qu’avec l’assentiment du plus grand nombre (par là, une autocratie peut être légitime)… On verra qu’une procédure de vote ne garantit pas l’absence d’un tel risque.
Comme dans une sorte de boucle « œuf et poule », ceux qui valident sont ceux qui ont le Pouvoir… comme dans l’aphorisme : « l’histoire est écrite par les vainqueurs ».

Démocratie

Venons-en au système de pouvoir plébiscité par la plupart des nations

Le contraire de peu (oligo) est beaucoup. En l’occurrence le contraire de petit nombre d’individus est beaucoup d’individus, une foule (Ochlocratie), jusqu’à la totalité des individus (Démocratie).

Démocratie : Pouvoir du Peuple (Démos : Peuple – Kratos : Pouvoir)
Le Pouvoir y est (théoriquement) distribué à proportion entre chaque individu.

Elle se caractérise par un système de vote qui prétend inverser le flux de l’exercice du Pouvoir qui s’orienterait du bas vers le haut et non plus du haut vers le bas… Mais ce système de vote se limite à la désignation de titulaires du Pouvoir et non pas de leur exercice qui, lui, peut toujours s’exercer du haut vers le bas.

Le concept de Majorité : filtre mathématique

Quand on oppose Oligocratie à Démocratie, on oppose le Peu au Peuple, le Peuple étant le Tout, la somme de tous les individus constituant la population de la Nation administrée par l’État – Peuple incluant les prétendants ou déchus oligarques -.

La Démocratie, désignant le Pouvoir du Peuple, désigne donc le Pouvoir du Tout (de tous).

Se pose ici une question d’aiguillage : l’expression du Pouvoir étant unique (une seule décision) par quel prisme (quel miracle) s’exprime-t-elle de façon univoque au nom de tous ?

Ce prisme est construit autour d’un filtre mathématique : le concept de Majorité.

Ainsi en passant d’Oligocratie à Démocratie, on se préoccuperait d’exclure la détention du Pouvoir par un petit nombre d’individus au profit de la détention du Pouvoir par la totalité du Peuple. Pour ce faire, on assigne à ces petits nombres d’individus (prétendants au Pouvoir ou pas) la qualité de Minorités face à la Majorité.

Passer d’une Oligocratie à une Démocratie consiste donc à transférer le Pouvoir d’une Minorité à une Majorité.

En d’autres termes, on déplace le Pouvoir d’une petite partie du Peuple (Minorité) vers une plus grande partie qu’on appelle Majorité – dès lors que la « grande partie » dépasse un seuil fixé traditionnellement à la moitié du Tout (50%).

Mais la Majorité n’étant, mathématiquement, pas le Tout, elle n’est donc toujours pas le Peuple. Mathématiquement encore, la Majorité est mineure (plus petite) vis-à-vis du Peuple tout entier. Simple application de la théorie des ensembles.

Donc une Démocratie est une Oligocratie exercée par une Majorité… et non par le Peuple.

La Démocratie est une forme oligarchique particulière basée sur un compromis mathématique.

Conséquences du paradoxe

Première conséquence : La Démocratie N’EST PAS le Pouvoir du Peuple mais d’une fraction majoritaire de ce Peuple.

Autre conséquence : La Démocratie n’est pas l’antonyme d’Oligocratie mais un sous-ensemble des Oligocraties possibles.

L’ambition d’un système démocratique est d’agréger la voix du Peuple (le Tout) via le vecteur unique de la Majorité. Or, on l’a vu, la Majorité n’est pas le Tout.

La Démocratie est donc un système de fragmentation des détenteurs du Pouvoir, un compromis.
Le but pour les impétrants-détenteurs du Pouvoir (bienveillants ou pas) est désormais d’obtenir l’assentiment de la Majorité pour exercer le Pouvoir. Encore là, ne pas confondre accession au Pouvoir et exercice du Pouvoir. On se penchera sur la question de « qui détient ce Pouvoir » en Démocratie.

Discussion

Propaganda

On imagine que dans une Démocratie, la propagande du Dictateur a disparue. Le caricatural culte de la personnalité y est définitivement balayé. Mais obtenir l’assentiment de la Majorité rend nécessaire et reproduit sous d’autres formes, parfois plus invasives et sournoises, la propagande qu’on pensait être l’apanage des totalitarismes.

Panurge ou la dynamique des foules

Ochlocratie : (okhlos, « foule » et –kratos, « Pouvoir »)
Régime politique dans lequel la Foule a le Pouvoir d’imposer sa volonté.

La majorité a-t-elle toujours raison ?

Bien qu’il soit impropre de considérer la Foule comme une émanation majoritaire du Peuple, la dynamique majoritaire n’est pas exempte des mouvements telluriques régulièrement attribués à la Foule. La fable de Panurge en est l’illustration la plus parlante.
Les instruments de contrôle ou d’influence de l’opinion des masses (TV, cinéma, réseaux sociaux, œuvres littéraires, presse,…), communément désignés sous l’acception « ingénierie sociale », sont parfois (souvent) à la main de personnes déterminées à en user pour se faire élire et accéder à ce que l’on nommera plus loin, la sphère de l’Oligarchie élective.

A l’aune de l’utilisation massive de ces procédés d’influence, on pourrait aller jusqu’à soupçonner la Démocratie de tendre, en certaines circonstances, à une forme dOchlocratie.

Du bas vers le haut ou du haut vers le bas

La Démocratie inverse-t-elle le flux de l’exercice du Pouvoir ? Garantit-elle de canaliser, extraire le Pouvoir de bas en haut et de l’exercer de haut en bas, ou le contraire ?

Les Démocraties restent majoritairement représentatives et voient leurs prétentions philo-populaires (du bas vers le haut) être régulièrement contrecarrées par un modèle de prises de décisions autoritaire (du haut vers le bas). En cela, elles ne diffèrent pas des modèles communément considérés comme oligarchiques ou même autocratiques.

Cas particulier : la Démocratie directe

La Démocratie directe dans laquelle l’essentiel des décisions sont censées être prises directement par les citoyens est une Démocratie dont les instances représentatives sont sensiblement réduites.
L’adjectif direct indique l’ambition de rapprocher le plus possible le citoyen de la prise de décision.

Ainsi les procédures électorales qui propulsent tel ou tel citoyen au statut d’élu sont réputées indésirables parce que les périmètres retenus sont trop larges.
Pour les tenants de la Démocratie directe, communes, cantons, départements, régions et Nation ne répondent pas à la proximité nécessaire à la prise de décision réellement démocratique. Dont acte.
En conséquence, on pourrait s’attendre à des propositions qui abolissent ce système électif.

A ce stade, deux options se présentent : les Référendums et la Démocratie Participative.

Référendums

Les référendums sont l’expression la plus pure de la Démocratie Directe. Notons que le compromis qui consacre la Majorité y est reproduit, mais il faut croire que cette limite ne peut être dépassée.
Le référendum est critiqué sous couvert de plusieurs arguments :

« Les électeurs ont tendance à ne pas repondre à la question posée » ; on parle de vote de réaction, de mécontentement, de rejet. Cet argument ne tient que si le recours au référendum est si rare qu’il représente une occasion inespérée de se « soulager » par le vote. La multiplication des procédures référendaires lisserait cette pente.

La critique qui est plus difficile à contrecarrer tient au contexte sociétal. Une décision de vote, comme on l’a vu, est forcément à la merci d’influences extérieures via propagande, effet nudge, matraquage et intimidations diverses. Dans une société où 10 milliardaires, à la botte ou, à l’inverse, commanditaires des cercles de pouvoirs politiques, économiques et financiers, possèdent 95% des médias et 100% des instituts de sondage, le résultat d’un référendum devient hasardeux, et s’y remettre équivaut à jouer au poker avec le Diable.
La solution serait de transformer totalement la sphère communicante du pays.

Enfin dernière critique : beaucoup de sujets sont, sans conteste et malgré le respect qui est dû à tous, trop complexes pour être tranchés à coup de bulletins de vote glissés négligemment dans l’urne. Les questions d’économie monétaire et financière et de géostratégie notamment.

La Démocratie participative

La Démocratie participative, prolongement ou succédané de la Démocratie Directe, consiste à instaurer des strates électives aux périmètres réduits dans lesquelles s’inscrivent des assemblées citoyennes locales. Dont acte encore.

Mais immanquablement, les dispositions issues de ces assemblées sont le fruit des mêmes « compromis majoritaires » considérés comme indésirables au départ.
Quand bien même le nombre restreint des siégeants rendrait « supportable » le compromis, le processus est tout de même reproduit.
Et de façon systémique, ce processus se reproduira dans toutes les assemblées locales.

Ensuite, chaque décision doit être portée au-delà de l’assemblée locale pour qu’elle puisse être défendue au sein de périmètres plus larges. D’où la multiplication en strate des assemblées, et par là, la multiplication des délégués chargés de porter le message. Et ainsi de suite… Ce qui dilue chaque disposition à travers autant de filtres que de strates d’assemblées et ce qui, comble du comble, reproduit le schéma de l’organisation électorale originale… en pire.
Dans les faits, on ne parvient généralement, au niveau national, qu’à une Démocratie semi-directe.

Bien que le « compromis majoritaire » ne soit pas concrètement contourné, en Démocratie directe deux facteurs y sont théoriquement modifié: le niveau de légitimité et la direction de la verticalité des décisions.

Outre l’hypothèque persistante posée par les risques d’ingénierie sociale qui peuvent altérer la sincérité des débats, l’estompage des instances représentatives et de la centralisation du Pouvoir est censé participer à l’amélioration de la légitimité des prises de décisions.
La question est de savoir si l’escalade des strates d’assemblées n’altère pas l’intégrité de telle ou telle décision prise en assemblée locale. A force de débats contradictoires, d’argumentations contraires, d’intérêts croisés, tout au long de chaînes de portages divers et toujours plus éloignées, la belle décision prise au village ne risque-t-elle pas de devenir revendication, puis desiderata, puis doléance, puis simple souhait une fois transmis et retransmis et re-retransmis aux niveaux supérieurs ?
Ainsi l’ambition d’une Démocratie directe, de proximité, d’extraction locale, authentique se voit émoussée par l’empilement de multiples assemblées implémentées comme autant de poupées russes, et les décisions qui y sont prises, rêvées pour être portées dans un geste d’une fidélité immaculée, perpétuent l’arithmétique du vote démocratique, quels que soient les artifices utilisés :
Le « compromis majoritaire » persiste… plus distordu encore.

Là où le système représentatif est vécu par la plupart des citoyens de façon consciente comme un système de compromis, là où le système représentatif affiche donc de fait son imperfection, les tenants de la Démocratie directe semblent considérer que les imperfections sont, sous leur égide, résiduelles, alors qu’au contraire elles sont démultipliées par l’accumulation par strates des procédures de vote en assemblées.

Cette multiplication des procédures de vote sous Démocratie directe veut aussi modifier la direction de la verticalité des décisions.
En effet, un système représentatif aboutit à des prises de décision exercées par les élus, ce qui oriente leur flux du haut vers le bas (à rebours des prétentions initiales), alors qu’en Démocratie directe ce flux est censé être inversé du bas vers le haut. C’est tout au moins le but recherché.
Mais n’assiste-t-on pas à une adaptation, dans le cadre législatif, du jeu bien connu sous les noms de 
« passe-parole », du « téléphone arabe », de « la rumeur » ou du « bouche à oreille » ? Ce jeu démontre à tout coup à quel point une information peut être facilement déformée quand elle passe au travers de plusieurs intermédiaires.
Que le flux décisionnel circule en apparence de bas vers le haut ne garantit pas que celui-là traduise fidèlement en bout de chaîne les volontés initiales.

Rappelons enfin que la Démocratie directe se décline généralement en Démocratie semi-directe et ne peut être, pour des raisons pratiques, appliquée à tous les niveaux et dans toutes les instances de gestion du Pouvoir. A fortiori au niveau national.

Un point positif tout de même : la Démocratie directe permet assurément une meilleure gestion de la subsidiarité des décisions.

Les « craties » ambivalentes

A noter que

  • Kakistocratie : Pouvoir des pires (kakistos : pire – Kratos : Pouvoir)
  • Cleptocratie : Pouvoir détenu par des « voleurs ».
  • Idiocratie : Pouvoir des idiots (idiốtês : homme vulgaire, sans éducation, sot, qui ne participe pas à la vie politique de sa république – Kratos : Pouvoir)
  • Technocratie / bureaucratie : Pouvoir des « petits hommes gris »
  • Méritocratie : Pouvoir des plus méritants

peuvent indifféremment advenir dans des structures oligocratiques ou dans des systèmes démocratiques. Mais il y a fort à parier que les quatre premiers items ont plus de chance de faire florès dans un système démocratique.

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Autocrate unique ou despotes multiples, démocrates jongleurs d’artifices majoritaires ou club de potentats, nulle liberté, nulle justice, nulle justesse, nulle sécurité ne seront jamais garanties auprès du Peuple dans son entièreté. Le système politique sera toujours oligarchique.

Il faut l’admettre. Il s’agira soit d’assumer les compromis et subir cette Mathématique du Pouvoir, soit d’opérer une sécession radicale et individuelle et finir ermite dans les bois.

Qui sont les oligarques ?

Une fois admis que le système sera quoi qu’il arrive oligarchique et que le Pouvoir politique sera détenu par des oligarques politiques, la question qui suit est : qui sont les oligarques ?

Deux options se présentent : soit ils s’imposent, soit ils sont choisis.

S’ils s’imposent, nous avons à faire à une Oligarchie autoritaire – la personne ou le groupe dirigeant pouvant être bienveillant ou pas -. Leur caractéristique principale étant qu’ils n’interagissent pas ou peu avec le reste du Peuple.

S’ils sont « choisis », nous avons à faire à une Oligarchie élective.

A ce stade, l’artifice mathématique mis en œuvre en Démocratie semble rassurer la plupart des individus ou, au mieux, passer pour un pis-aller, mais il est toujours question d’une Oligocratie dont les dirigeants sont désignés par la Majorité. La différence entre ces profils oligarchiques est que l’Oligarchie élective bénéficie, à tort ou à raison, d’un capital légitimité plus important (…ou d’une illégitimité moins exposée).

Mais qui construit cette légitimité ? Rappelons-nous que « l’histoire est écrite par les vainqueurs » !

L’expérience enseigne que l’épure recherchée (administration vertueuse) par l’exercice électoral s’érode à mesure que l’an zéro s’éloigne. Les élus font leur nid et quelques générations plus tard les procédures électives, participatives, holacratiques* sont perverties, et les caractéristiques primaires de l’Oligocratie reprennent leurs droits. D’artifices mathématiques en compromis statistiques, le club plénipotentiaire se reconstitue inexorablement. Les élus deviennent les nouveaux oligarques.

Seuls l’assiduité et le zèle citoyen ainsi que l’organisation en réseau de contre-Pouvoirs peuvent contrecarrer les imperfections du système et endiguer ses dérives.
Seuls les ermites ont le droit de déserter la procédure électorale ; ceux qui restent doivent assumer le pis-aller auquel ils se soumettent.

En conclusion, l’Oligocratie est le système d’organisation politique universel des sociétés humaines, unique et indépassable.

Les démocraties sont naturellement portées à concentrer toute la force sociale dans les mains du corps législatif. Celui-ci étant le pouvoir qui émane le plus directement du peuple, est aussi celui qui participe le plus de sa toute-puissance. On remarque donc en lui une tendance habituelle qui le porte à réunir toute espèce d’autorité dans son sein. Cette concentration des pouvoirs, en même temps qu’elle nuit singulièrement à la bonne conduite des affaires, fonde “le despotisme de la majorité

Alexis de Tocqueville

* Holacratie : doctrine dédiée au management d’organisations humaines au sens large sous forme de management constitutionnel, fondée sur la mise en œuvre formalisée de modes de prise de décision et de répartition des responsabilités communs à tous dans une constitution. Parmi les outils : réunions de gouvernance et des réunions de triage ; gouvernance par cercles interdépendants et auto-organisés, doubles liens entre deux cercles, gestion par consentement et élections sans candidat.


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